Congrès IAHAIO juillet 11-13 2016
Une opportunité que ce congrès se fasse à Paris. J’avais l’envie d’étendre mes connaissances en médiation animale. Rencontrer des personnes venues du monde entier pour échanger sur leurs pratiques, ne pouvait qu’enrichir la mienne.
Malgré une belle organisation prise en charge par l’équipe de la Fondation Sommer, j’en ressors perplexe et interrogative. Et surtout matraquée par un mot qui pèse sur notre cadre de travail depuis quelque années, envahissant tous les étages de ce grand espace de la Villette : évaluation. Les plénières pleines de chiffres, colonnes, courbes et les workshops remplis d’un mot culte : randomisation.
Impossible de me concentrer sur les contenus, je suis donc sortie quasiment à chaque intervention pour discuter avec des personnes errant dans les couloirs dans le même état d’étonnement.
Les scientifiques auraient-ils envahis le cœur de la médiation animal ?
L’évaluation serait elle devenu la petite sœur de la séduction ?
Et pour séduire qui ?
Soi-même ? Les autres ? Pour une course à la reconnaissance après laquelle on courre tous à des degrés divers. La science ? Qui a supplanté Dieu et devient le nouveau maître à penser à qui l’on doit tout sacrifier.
Parce que là est ma question aujourd’hui : dois-je sacrifier l’éthique que j’ai de mon métier, pour plaire et me plier aux exigences de groupes témoins, et variables diverses ?
La recherche oui, mais à quel prix ?
Dois-je laisser instrumentaliser les personnes et les chevaux pour servir la mise en place de futurs protocoles aux quels je ne pourrais pas adhérer ? Deviendront –ils objets d’études, alors que nous nous battons tous les jours pour qu’ils deviennent sujet d’eux mêmes ? L’incohérence frappe à notre porte et nous lui ouvrons sans prendre la moindre précaution.
Biologiste moléculaire de formation universitaire, j’ai, entre autre, travaillé pour Sanofi sur des sujets passionnants comme l’hormone de croissance et l’encodage la capsule du VIH. Mais j’ai aussi connu la course des études à publier, les étudiants aux dents longues, les patrons de thèse auxquels il fallait plaire avec l’espoir d’être prise en post doc.
Mais j’ai quitté ce monde pour ne pas me prostituer, et renier mes valeurs, ce n’est pas aujourd’hui que je vais céder à cette pression.
Alors oui, notre métier a besoin de théorisation, d’être conceptualisé pour qu’il se fasse une place reconnue et qu’il prenne ses lettres de noblesse. Les réalités économiques pèsent aussi dans notre quotidien.
Mais c’est à nous, accompagnants, thérapeutes et soignants, d’inventer une mise en lumière qui nous corresponde dans sa forme et dans son contenu. Et je ne suis pas la seule à me poser cette question. Alors oui, regroupons-nous et réfléchissons. Il y a des pistes possibles.
D’ailleurs notre équipe présentait un poster sur un travail promouvant la remise du corps au sein des apprentissage en milieu scolaire et nous l’avons formaliser pour qu’il soit le reflet de notre travail, c’est à dire qu’il suggère dans sa forme, la remise en route du processus créatif de l’enfant par le mouvement.
La science devrait être au service du terrain et de la pratique. J’ai le sentiment désagréable de penser que nous essayons de nous plier à elle.
Je me souviendrai du dernier workshop auquel j’ai assisté : un scientifique voulant tout exliquer. Quelle mission, et quel poids !
Mais que restera t-il à la science quand tout aura été décortiqué ?
La vie est mouvement, insaisissable. Laissons-la nous traverser. En restant à notre juste place, et à son service.
Et faire notre métier , tout simplement.
L’humilité sera garante de nos avancées.
Nathalie FRILLEY